Préparation au CNRD

Le Concours National de la Résistance et de la Déportation a plus d’un demi-siècle d’existence, il a été crée officiellement en 1961 à l’image du concours général par Lucien Paye, ministre de l'Éducation nationale, à la suite d'initiatives d'associations et particulièrement de la Confédération nationale des combattants volontaires de la Résistance (CNCVR) ; A cet égard l’Inspecteur général Louis François, ancien résistant, jouera un grand rôle au titre de conseiller du ministre, puis il assurera la présidence du concours durant trente ans. 

Louis FRANÇOIS, Inspecteur général de l'Education nationale


Ce concours a pour objectif de perpétuer chez les jeunes Français la mémoire de la Résistance et de la Déportation. Malgré la forte concurrence des manifestations nationales requérant une mobilisation des enseignants à des fins de maintenir le lien intergénérationnel sur les grands événements liés à notre histoire, notamment du XXè siècle,  et des concours de toute nature le CNRD demeure le concours le plus connu, et celui qui connaît une forte participation des enseignants et de leurs élèves. Depuis ses débuts près de 1,5 millions d’élèves ont participé au CNRD.
 

Paragraphes
Une participation importante mais en recul

Cependant, depuis le début des années 2000 le CNR connaît une érosion régulière des candidats présentés : de 1961 à 1990 la participation était établie autour de 50 000 élèves par an avec des pics à 60 000, depuis l’étiage est de 40 000, avec des années creuses comme 2023 (29409 élèves) ou quelques années hautes telle 1991 (51 000 élèves). Ces données sont par ailleurs relatives eu égard la forte croissance des effectifs des élèves dans le secondaire, collèges et lycées puisque le concours est ouvert aux deux cycles : dans les années 60 le secondaire compte 3,8 millions d’élèves, en 2025 les effectifs sont de 5,6 millions, dont 40% de lycéens. On a donc des courbes en ciseaux qui interpellent tous les acteurs, mais les facteurs explicatifs sont complexes. Au rang desquelles on peut citer :
    - certains sujets délicats, dont les contenus touchent de manière marginale le traitement des programmes d’histoire, ont pu contribuer au fil des années à décourager certains professeurs à s’engager dans la préparation du concours (2006 : « Résistance et monde rural » ; 2009 : « Les enfants et les adolescents dans le système concentrationnaire nazi ») ; mais, a contrario, des sujets réputés plus aisés (2010 : « L’appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle et son impact jusqu’en 1940 ») n’ont pas apporté un regain de participation ;
    - les départs à la retraite de professeurs engagés de longue date dans ce concours n’ont pas été suffisamment compensés par l’engagement des nouvelles générations qui se sentent peut être moins concernées par ces enjeux ; d’aucuns peuvent être aussi lassés par le discours  sur le Devoir de mémoire ;
    - les facteurs conjoncturels sont importants : il y a d’une part la multiplication et la concurrence des concours  comparables dans de nombreuses disciplines,  des manifestations mémorielles, des anniversaires, tant à l’échelle nationale qu’aux échelles locale et régionale; d’autre part,  dans le contexte des réformes pédagogiques sur les deux cycles les enseignants doivent faire face à beaucoup d’innovations (programmes, examens, nouveaux enseignements) et hiérarchisent leurs charges de travail, en allant au plus immédiat.

Cependant, au fil des années de nombreux acteurs partenaires de l’Education nationale ont accru les efforts afin d’accompagner les enseignants lors de la préparation des élèves au concours (associations et fédérations d’anciens résistants, déportés, musées et mémoriaux, conférences historiques); elles fournissent des dossiers complets à chaque session pour aider professeurs et élèves à cerner au mieux les contours des sujets.

Sam BRAUN, intervenant au lycée LAVOISIER

 Le concours doit beaucoup, et c’est sa profonde singularité, à l’intervention dans les classes des représentants des associations d’anciens résistants et d’anciens déportés. Ce contact direct avec les témoins permet une relation différente avec l’histoire, et permet d’interroger le lien intime et complexe entre mémoire et histoire : mémoire de l’individu, mémoire du groupe, et histoire qui se construit et se reconstruit au gré des problématiques de la recherche scientifique ; l’extinction du vivier des témoins doit être relayée par l’usage d’autres voies de transmission de ce vécu, en faisant appel aux supports audiovisuels.

 

Une période de mutation

Le CNRD traverse à maints égards une période de mutation, dont les aléas des candidatures n’est qu’un signe. L’évolution des sujets reflète à la fois l’évolution du concours lui-même qui centré initialement sur la mémoire de la Résistance est devenu  ensuite celui de Résistance et  de la Déportation. Les thèmes abordés, source de complexité pour la préparation, sont aussi le miroir de l’évolution de la recherche historique : intérêt pour les lieux de mémoire, les personnages clés mais aussi les humbles, l’approche du fait par l’œuvre artistique et le rôle des moyens d’information,, par les catégories sociales et les genres, etc. Il témoigne surtout de l’extraordinaire retournement autour de la Shoah depuis les années 80. De sorte, que le singulier devient dans la réalité des intitulés un pluriel, celui des résistances et celui des déportations, ce qui n’est pas un mince changement de perspective, et qui n’est pas sans incidence sur les difficultés que peuvent rencontrer les enseignants compte du peu de temps dont ils disposent pour traiter des questions nouvelles dans la marche des programmes. Les enjeux de mémoires, les débats récurrents sur les programmes ne sont pas de nature à une pratique sereine du traitement de ces questions, ils contribuent beaucoup par contre à les déstabiliser, voire à prendre le parti de l’évitement.

Les nouveaux enseignements et dispositifs d’enseignements introduits depuis plusieurs décennies sont de nature à favoriser les préparations au concours, notamment de type collectif (enseignements d’exploration, histoire des arts, accompagnement personnalisé, validations des compétences informatiques, voire T.P.E., oraux des enseignements de spécialité ) doivent être présentés comme des possibilités nouvelles d’engager ces travaux dans une autre démarche que celle du cours, de la visite, ou de l’accueil des témoins : chaque situation a sa place, mais il faut décliner sur une palette plus large la préparation, sur des modalités complémentaires (cours, travaux individualisés, collectifs) et des disciplines conjointes ; à cet égard, l’élargissement progressif du champ d’interrogation sur la Résistance et la Déportation, qui se traduit par une plus grande diversité de sujets, devrait susciter une implication plus forte des disciplines autres que l’histoire, car les entrées concernent désormais les lieux de mémoire, les genres, les œuvres artistiques, les catégories sociales.
 

Evolution des modalités et des sujets du CNRD

Les responsables du concours ont cherché également à faire évoluer les épreuves et les modalités de passation. 
-    À partir de 1977, des thèmes différents sont souvent proposés pour les deux niveaux. Sauf mention contraire les thèmes sont communs aux deux niveaux ; 
-    En 1979, à titre expérimental, les élèves de troisième sont invités à présenter un « mémoire collectif » inspiré par le thème national. Cette expérience est reconduite en 1980 puis définitivement adoptée l’année suivante ;
-    En 1982, le Concours est ouvert aux classes de première, et aux classes de seconde en 1995 ;
-    A partir de 2003, les jurys départementaux du Concours peuvent proposer le choix aux candidats participant aux épreuves individuelles entre une composition d’une part, et une étude de documents donnant lieu à des questions et à la rédaction d’un paragraphe argumenté sur un sujet précis d’autre part ;
-    En 2009  de nouvelles épreuves, dites de « travaux audiovisuels » marquent la prise en compte de nouvelles pratiques pédagogiques dans les classes, liées aux technologies d’aujourd’hui. Les lauréats récompensés pour la réalisation d’un travail exclusivement audiovisuel reçoivent le prix spécial du conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) pour la mémoire ; 
-    Depuis 2016 (article 5 de l’arrêté du 23 juin 2016), le concours comporte quatre
-    catégories de participation :
•    Première catégorie : classes de tous les lycées (et assimilées) : réalisation d’un devoir individuel en classe, lors d’une épreuve de trois heures, portant sur un sujet défini au niveau académique dans le cadre du thème annuel (quelques exemples sont donnés pages 17-18).
•    Deuxième catégorie : classes de tous les lycées (et assimilées) : réalisation d’un travail collectif pouvant prendre différentes formes et portant sur le thème annuel.
•    Troisième catégorie : classe de troisième (et assimilées) : réalisation d’un devoir individuel en classe, lors d’une épreuve de deux heures, portant sur un sujet défini au niveau académique dans le cadre du thème annuel.
•    Quatrième catégorie : classe de troisième (et assimilées) : réalisation d’un travail collectif pouvant prendre différentes formes et portant sur le thème annuel.

Les cahiers politiques du Comité Général d'Etudes N° 3 Août 1943 (collection personnelle J.P. Lauby)


Sur le fond, le CNRD va introduire aussi des évolutions majeures.
-    Le thème de la déportation et le système concentrationnaire apparaissent dès 1965, mais sans autres précisions ;
-    En 1995 le sujet prend en compte « les camps de concentration et d’extermination nazis », cette distinction apparaît donc 30 ans après la création du concours ; le sujet est repris en 2000 :
-    Le concours intègre ensuite les catégories sociales  avec les « les jeunes dans la Résistance » (1996), puis les « femmes dans la Résistance » (1997), « les étrangers dans la Résistance (1998), voire « le monde rural » (2006) ;
-    Une autre étape est franchie avec le sujet de 2005 : « 1945 : libération des camps et découverte de l’univers concentrationnaire ; crime contre l’humanité et génocide » ; puisqu’il invite à réfléchir à des notions qui caractérisent la Shoah, mot qui n’apparaît nullement dans l’intitulé.
-    Enfin , le sujet 2025  renoue avec la thématique de l’après-guerre, de la reconstruction de la France autour des travaux du CNR et des idées politiques du Général de Gaulle (sujet également de 1992).