Le 20 juillet 1942, le convoi 8 partait de la gare d’Angers, en déportant 769 Juifs à Auschwitz-Birkenau. Seuls 20 d’entre eux survivaient en 1945. Parmi eux Henri Borlant, membre de l’UDA et grand témoin, interviewé par Roger Herman en 2007.
Henri Borlant est né le 5 juin 1927 à Paris. Juifs Français d’origine russes, ses parents vivaient avec leurs neuf enfants dans un immeuble populaire du 13e arrondissement. La famille Borlant est évacuée en août 1939 et installée à 25 km d’Angers. Le 15 juillet 1942 Henri Borlant est arrêté à leur domicile par des soldats allemands puis emprisonné pendant 5 jours au séminaire d’Angers, avec son père Aron, son frère Bernard, et sa sœur Denise. Ils sont déportés par le convoi 8 depuis la gare d’Angers le 20 juillet 1942. Henri ne reverra jamais sa sœur, il a alors 15 ans.
À son arrivée à Auschwitz-Birkenau le 23 juillet 1942, Henri Borlant est tatoué du matricule 51055 puis affecté au kommando Maurerschule et envoyé au bloc 7 d’Auschwitz 1 où il se lie d’amitié avec Charles Papiernik, Jacques Klinger et Charles Naparstek. Le 28 octobre 1944, il est évacué vers le camp de Sachsenhausen puis d’Oranienbourg et d’Ohrdruf, où il souffre terriblement. Il est un jour réquisitionné pour emmener des morts à Buchenwald. Pour la première fois, il voit un crématorium. Par la suite il est affecté à la cantine des SS avec Henri Ehrenberg, un Juif polonais avec qui il parvient à se procurer des cigarettes pour apaiser la fureur du kapo qui faisait atrocement souffrir son ami Jacques Altmann. Début avril 1945, au moment de l’évacuation du camp, il planifie avec Henri Ehrenberg leur évasion. Ils rejoignent la ville d’Ohrdruf et trouvent refuge à la boucherie de Walter Groll, un Allemand anti-nazi qui protégeait des prisonniers de guerre français. Les jours suivants, les deux camarades accompagnent la visite du général Eisenhower qui découvre les atrocités nazies.
Henri est rapatrié en France mi-avril 1945 à Paris où il retrouve sa mère et ses frères et sœurs. Il a alors 18 ans et revient seul de déportation. Il doit annoncer à sa famille que son père, son frère et sa sœur ne reviendront pas. Tous les trois ont été assassinés à Auschwitz en 1942, comme ses grands-parents maternels. Avec ses camarades anciens déportés, il est envoyé dans des maisons de repos où ils connaissent ensemble de grandes joies. Il y rencontre Nathan Prochovnik et Charlie Zlotnik avec qui il réapprend à vivre. Aidé par Désiré Haffner, il intègre un lycée du 13e arrondissement qui le conduit à des études de médecine puis épouse Hella Holst, avec qui il a trois filles.
Si parler de sa déportation avec sa famille fut impossible, Henri Borlant est resté très proche de ses camarades déportés, en particulier Charles Naparstek et Jacques Altmann, son « inséparable ». En 1992, il œuvre à la pose d’une plaque commémorative au grand séminaire d’Angers où les déportés du convoi 8 avaient été emprisonnés. La même année, il rejoint l’association Témoignage pour mémoire où il participe avec l’historienne Annette Wieviorka à la collecte de 130 témoignages vidéo de survivants de la Shoah, aujourd’hui déposés aux Archives Nationales. Fervent défenseur de la démocratie et des Droits de l’Homme, Henri Borlant a témoigné à de très nombreuses reprises auprès des jeunes générations, respectant la promesse faite avec ses camarades au camp : « Si l’un d’entre nous devait en réchapper il faut qu’il raconte pour que ce crime ne reste pas inconnu et les bourreaux impunis. »