Discours prononcé le 8 janvier au cimetière de Bagneux par Raymond Heimburger, Trésorier de l’UDA
Cher Roger,
Aujourd’hui nous sommes ici pour t’accompagner, être avec toi. Comme il est dit dans le texte biblique intitulé Kohélet, nommé également « l’ecclésiaste » : « il y a un temps pour tout et chaque chose a son heure sous le ciel. Il est un temps pour naître et un temps pour mourir » et je rajouterai entre ces deux extrêmes « un temps pour vivre ». Ce magnifique texte a, dit-on, été écrit par le roi Salomon, considéré comme un sage... un peu comme toi, me semble-t-il.
Un temps pour naître : tu es né le 8 mai 1931 et ton père a été arrêté puis déporté en 1942, tu ne l’as jamais revu. Puis tu as été un « enfant caché » de 1943 jusqu’à la fin de la guerre, la fin de la Shoah. Tragique entrée dans la vie !
Un temps pour vivre : nous nous sommes rencontrés pour la première fois en l’an 2000 quand tu es entré « en bénévolat », à « l’Amicale d’Auschwitz » accompagnant ton oncle par alliance Henry Bulawko, historien, écrivain et ancien Déporté à Auschwitz, qui en était le président. Tu disais le concernant « son remarquable don d’écriture et de médiation m’enchantait. C’était un monument ». Tu avais à son égard la plus grande admiration.
Par ailleurs tu avais écrit : ce bénévolat m’as permis d’avoir « la révélation » de mon propre passé d’enfant caché et de comprendre le sens profond de la déportation et de la Shoah.
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| Ton investissement fut total. En 2004, l’Amicale devint « l’Union des Déportés d’Auschwitz » par regroupement de diverses associations. Le président devint Raphaël Esrail et, tout naturellement, tu fus élu Secrétaire général. Tu as accompli une tâche considérable de coordination et de mise en oeuvre des activités dont essentiellement les voyages de Mémoire à Auschwitz, l’enregistrement des témoignages d’anciens Déportés, les témoignages d’anciens Déportés dans les établissements scolaires, la conception et la diffusion du bulletin de l’UDA, les commémorations des camps du Loiret et de la rafle du Vel d’Hiv dont tu étais le maître des cérémonies, ainsi que celle du 27 janvier l’Arc de Triomphe sans compter le repas des anciens Déportés à la mairie du 20e arrondissement le dernier dimanche de janvier... et tous les problèmes « d’intendance »... Et pourtant tu restais toujours le même : avenant, à l’écoute de tous, toujours disponible et un brin taquin. Ainsi, le vendredi soir, quand j’étais à l’Association et que je partais à l’office, toi le « mécréant », tu me disais un « petit sourire en coin » : « et surtout, prie pour moi, on ne sait jamais, ça peut m’être utile». Certes, tu n’avais aucune spiritualité religieuse, mais tu étais porteur et tu développais une spiritualité « laïque » extraordinaire. Le souci de l’autre t’a toujours habité et échanger avec toi était un vrai plaisir. Un temps pour mourir : le décès de ton épouse Evelyne le 28 octobre 2014 t’a profondément marqué et ta santé s’est rapidement dégradée. Tu as été hospitalisé en septembre 2016 et quittais ainsi officiellement l’UDA. En novembre 2017, tu intégrais un Ehpad dans le 18e arrondissement de Paris. Ce lundi 1er janvier tu nous as quittés. Repose en paix. Tous les adhérents et sympathisants de l’UDA Roger était un homme très discret. Or, il a réalisé le plus grand nombre des interviews de nos camarades rescapés de l’UDA. |